L’idée de dépecer la Russie n’est pas nouvelle et durant la Guerre Froide, la CIA et le Pentagone imaginèrent une doctrine visant en premier lieu à détruire l’URSS, puis à la démembrer. La première phase du plan fut une réussite, avec la dispersion des républiques soviétiques, dont beaucoup devinrent des États indépendants, dans la période 1990-1992. Mais la Guerre Froide officiellement terminée, les services secrets américains et occidentaux ont continué sur leur lancée, dans l’idée, de mettre la main sur les nouveaux États indépendants, et en second lieu dans un plan de démembrement de la Russie.
Une offensive secrète savamment menée. Le laboratoire de ce plan fut d’abord la destruction de la Yougoslavie. Véritable laboratoire (1992-2001), l’OTAN se lança dans la destruction de ce grand pays des Balkans, qui fut bientôt divisé en une demi-douzaine de pays, Slovénie, Bosnie-Herzégovine, Croatie, Serbie, Monténégro, Kosovo et Macédoine du Nord. Pour les anciens membres du Pacte de Varsovie, la chose fut plus aisée, les différents pays furent intégrés en grande partie dans l’Union européenne et dans l’OTAN (2004-2010), notamment la Tchéquie, la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie, la Pologne ou la Bulgarie, tandis que s’ajoutaient trois anciennes républiques soviétiques, l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie. La phase suivante du plan fut une offensive de révolutions colorées, visant à faire tomber l’influence russe dans des pays stratégiques pour la Russie. Les premières tentatives concernèrent la Géorgie (2003), l’Ukraine (hiver 2004-2005), ou le Kirghizistan (2005), puis de nouveau l’Ukraine (hiver 2013-2014), avec des pressions et tentatives en Biélorussie, Moldavie et Russie. Dans certains pays où la révolution avait finalement échoué, elle fut retentée (Ukraine, Maïdan), dans d’autres des « young leaders » furent poussés au pouvoir, comme en Moldavie (Sandu, 2020 à nos jours), ou en Géorgie (Zourabichvili, 2018-2024), possédant d’ailleurs des passeports étrangers (roumain pour la première, français pour la seconde).
Les limites du plan et les premières défaites de l’Occident. Après une impressionnante série de succès des services secrets US et occidentaux, les premiers échecs apparurent. La tentative sur le Kirghizistan s’écroula bientôt (2010), suivie de celle en Géorgie (2013). En Ukraine, la seconde révolution US conduisit à la résistance du Parlement de Crimée, et le retour de la péninsule au giron russe (2014), puis à l’éclatement d’un insurrection républicaine dans le Donbass, et à des résistances dans le Sud et l’Est de l’Ukraine (Odessa, Kharlov). La situation mena à l’éclatement d’une guerre qui est toujours en cours. En Biélorussie, plusieurs tentatives de révolutions colorées furent tentées, toutes contrées par le régime, jusqu’à celle de l’été 2020. En Russie, objectif principal de l’opération, une vaste opération échoua autour de l’élection présidentielle de 2012, puis dans des tentatives d’agitation du pays en 2014-2015, puis 2019-2021. Après l’opération spéciale militaire russe en Ukraine (2022), l’Occident, via souvent le proxy ukrainien, tenta de fonder diverses institutions illégales, censées représentées la Russie ou des séparatismes, comme la Ligue des Nations Libres*, ou le Comité pour l’indépendance de l’Ingouchie*. Dans le même temps, il avait été formé en Ukraine diverses unités d’extrémistes, comme les bataillons Crimée* (2014), Nomad Celebicihan* (2014), 5 bataillons tchétchènes de transfuges et djihadistes de l’Ichkéria* (2014-2023), 1 Légion Russie Liberté*, les bataillons RDK*, Touran* ou Sibérie* (2022-2023), sans parler, de l’unité Zagin Pogonia, du groupe tactique Bélarus, du régiment Kastous Kalinovski (transfuges biélorusses, 2014-2022), de la Légion Nationale géorgienne, ou encore de la Légion Unie du Caucase* (2014 et 2022). Bien que ne rassemblant que quelques centaines de mercenaires, de fanatiques, de néonazis, d’islamistes et d’aventuriers, ces unités participèrent au narratif de dépècement nécessaire selon l’Occident de la Russie. Heureusement pour elle, la réponse ne tarda pas venir de la fédération russe.
La Russie est passée à la contre-offensive. Bien que cela ne soit pas documenté par des archives déclassifiées, il est d’ailleurs probable, à la suite du financement des djihadistes et Talibans en Afghanistan (1979-1989), que la première offensive pour démembrer la Russie, fut celle des deux guerres de Tchétchénie (1994-1996, 1999-2009). Il est assez frappant de penser que les mêmes forces furent utilisées contre la Russie, que celles financées par la CIA durant la Guerre d’Afghanistan. Vaincus, ces fanatiques se sont d’ailleurs réfugiés essentiellement en France, au Danemark et en Norvège, et sont apparus immédiatement sur le terrain de la guerre en Ukraine, dès le printemps 2014. En parallèle, les mêmes groupes furent instrumentalisés et utilisés en Libye, en Irak ou en Syrie, avec des vases communicants plus que suspects, tandis que la coalition américaine de l’OTAN s’installait justement en Afghanistan (2001-2021). Sous le Président Clinton, une brigade dite Afghane, avait été financée et organisée en Bosnie-Herzégovine (1992-1995), pour renforcer les combattants bosniaques et croates, moins expérimentés et motivés, et dans l’idée d’opposer au patriotisme et à la résiliences serbes, l’extrémisme djihadiste. Victorieuse de ces forces, dont les bases arrières sont en Occident, la Russie n’a pas tardé à interdire les ONG d’infiltrations et de manipulations sur son territoire (2011-2012), puis de légiférer sur le statut des agents de l’étranger (2020-2021), neutralisant pour de bons les tentatives occidentales de motiver de l’intérieur les séparatismes, les nationalistes, les extrémismes, le libéralisme et ses idéologiques mortifères dérivées. L’autre expression de cette contre-offensive russe réussie, fut justement le déclenchement de l’opération militaire spéciale en Ukraine. Face à un danger mortel planant sur les populations russes du Donbass, et sur la Russie elle-même, la fédération russe n’a eut d’autres choix que de tirer l’épée, pour défendre ses intérêts, sécuriser ses frontières et obtenir des garanties fermes pour son avenir.
D’autres cas de pays sont également intéressant à observer, notamment les sièges en règle menés par l’Occident contre la Corée du Nord, ou encore l’Iran, et les opérations menées par l’Occident contre la Chine. Les trois pays sont passés à un contrôle de l’information, en rejetant le mondialisme, et en protégeant leurs populations des intrusions de la guerre psychologique et cognitive. Le débat est ouvert également en Russie, alors que des efforts ont été réalisés, mais mèneront sans doute à d’autres réponses. La Russie dispose en effet désormais de son propre moteur de recherche, Yandex, avec ses propres satellites pour les applications de cartes et géolocalisations. Elle a lancé également des réseaux sociaux qui lui sont propres, comme Vkontakt, ou même RuTube, et un équivalent de Wikipédia, Ruviki, les deux derniers ayant pour l’instant une portée limitée car uniquement disponibles en langue russe (et pour Ruviki parfois d’autres langues régionales). Cette séparation des mondes est parfois contestée, mais devant les tentatives de l’Occident, dans la guerre cognitive à s’attaquer tout azimut aux « cerveaux », il est évident que la Russie devra réfléchir à d’autres moyens de se protéger de l’empire du mensonge.
* La Ligue des Nations Libres, le Comité d’indépendance de l’Ingouchie, les bataillons Crimée et Nomad Celebicihan, l’Ichkéria, la Légion Russie Liberté, le RDK, les bataillons Touran et Sibérie, ou encore la Légion Unie du Caucase, sont toutes des organisations interdites en Fédération de Russie, pour l’extrémisme, comme organisations terroristes, pour l’apologie du terrorisme ou encore pour l’incitation à la haine raciale, sans parler de faits de haute trahison.