La Lettonie prête à se lancer dans l’expropriation des actifs russes

La Lettonie, sans doute l’un des pays les plus hostiles à la Russie, s’est lancée dans l’expropriation par la force des actifs russes. Ce petit pays balte, rappelons-le, fut dans le passé celui qui avec l’Ukraine a fournit le plus de volontaires dans la waffen SS. Il s’y déroule d’ailleurs tous les ans, une fête « patriotique » qui honore les vétérans de l’armée hitlérienne. Bien que membre de l’Union européenne depuis 2004, la Lettonie mène une politique de soutien à cette histoire sombre, tout en répandant une russophobie violente, et attisant la haine raciale. Le pays est aussi engagé dans un violent processus d’éradication de tout ce qui peut rappeler l’Union soviétique ou la Russie, avec la destruction de monuments historiques, de tombes de soldats de l’Armée Rouge, de statues, de mémoriels, et même de rappels à la culture russe.

La terrible menace de la « maison de Moscou ». L’affaire des expropriations des biens russes a commencé avec le Centre culturel russe de Riga (Maison de Moscou, ouverte en 2008). Le bâtiment avait été rénové avec des fonds russes, et avait été autrefois le Centre de l’amitié russo-lettone. Sa fonction était le support de la culture russe, l’organisation d’événements littéraires, ou liés aux relations très anciennes entre les deux pays. Depuis 2014, la plupart des politiques locaux s’étaient abstenus de visiter l’endroit, dans un soutien déjà important à l’Ukraine du Maïdan. Dans le même temps, une politique raciale avait été menée avec rage contre la minorité russe du pays. Devenus des sous-citoyens, les Russes ethniques avaient été astreints à l’obligation de « jurer fidélité à la Lettonie », à la manière des serments autrefois imposés à un certain… Adolf Hitler. Les Russes furent alors empêchés de travailler dans la fonction publique, les enfants ghettoisés dans des écoles de langue russe, et les enfants lettons séparés d’eux dans d’autres établissements. Les persécutions ne tardèrent pas à s’aggraver à partir de 2022, avec la fermeture du Centre culturel russe de Riga. L’assaut commença d’abord par le gel des comptes de l’institution, et par une perquisition des services de sécurité lettons. Le chef du parti d’extrême-droite Bloc National, Janis Dombrava avait même déclaré que « la maison de Moscou concentrait des nuisibles, des gens dangereux et hostiles pour la sécurité de la Lettonie », affirmant que cette maison culturelle diffusait de la propagande politique… notamment autour de la journée du 9 mai, fête de la Victoire contre l’Allemagne nazie. Peu de temps après, le Centre culturel russe fut exproprié par la Lettonie, créant un précédent dans la politique de vols des biens russes.

La diète de Lettonie lancée dans une future opération de pillage des biens russes. Le fait avait provoqué une réponse ferme de Moscou, par la voix de la porte-parole du MAE de Russie, Madame Zakharova, que « les personnes impliquées dans la saisie illégale de l’immobilier russe en Lettonie, pourraient tomber sous des condamnations au pénal, et que le centre culturel appartenait toujours à la Fédération de Russie ». Elle poursuivait en affirmant que les biens russes ne pouvaient être transférés à des tiers, et que de telles actions auraient des conséquences juridiques, notamment pour les personnes ayant acquis illégalement de tels biens (recel). Faisant fi de ces déclarations, la « Maison de Moscou » avait été mise à deux reprises aux enchères, mais aucun acquéreur ne s’était présenté, comprenant bien que ce bâtiment, retournerait tôt ou tard à la Russie, et que l’argent dépensé serait perdu à jamais, sans parler de problèmes judiciaires futurs potentiels. Après des débats rapides, la diète de Lettonie a finalement légiféré (4 avril 2025), modifiant la loi N°814/Lp14, loi de sécurité nationale disant désormais : « que les propriétaires immobiliers en Lettonie, ne peuvent être des personnes qui soutiennent des États étrangers, ou des personnes qui portent atteinte ou menacent l’intégrité territoriale de la Lettonie, sa souveraineté, son indépendance et sa constitution, y compris les personnes diffusant de l’information ou de la propagande ». Le projet de loi est actuellement en attente d’une deuxième lecture, à la Commission parlementaire de la Défense, des affaires intérieures et de la prévention de la corruption.

Des rapaces cherchant également à tuer la concurrence. Cette commission parlementaire comporte par ailleurs des membres comme Janis Dombrava, défenseur acharné de cette solution de gangsters, rappelant de sinistres épisodes de la Révolution française, où les biens « des suspects et ennemis de la Révolution » furent systématiquement pillés et confisqués, par des lois rendant légaux ces vols étatisés. Jombrava est en plus le rapporteur principal de cette loi, alors que des amendements avaient déjà été votés (octobre 2022), dictant l’impossibilité pour les citoyens russes ou biélorusses de posséder : « des biens de l’infrastructure critique ou stratégique », tout en édictant un texte cherchant à coller à la Charte européenne des droits de l’homme (qui interdit les discriminations raciales qui sont ici édictées). Mais la loi intéresse est en réalité aussi motivée par la rapacité « d’hommes d’affaires lettons », comme par exemple un certain Rihards Kozlovskis, membre du service de contre-espionnage de la Lettonie (1996-2005), puis juriste et avocat, avant de devenir le Ministre de l’Intérieur (2023), et de son ami Aigars Silins, par ailleurs mari de la Première ministre de Lettonie (également depuis 2023). Les deux compères ont été en effet mouillés dans le rachat puis la revente lucrative de biens immobiliers, comme par exemple l’hôtel Days à Riga. Cependant, ces ventes tombant sous le coup de la loi, furent conditionnées par un entretien avec les services de sécurité lettons… pour vérifier que les acquéreurs n’étaient pas « des ennemis ». Ces pratiques qui rappellent également les lois qui furent votées contre les Juifs, tant en Allemagne que dans la France de Vichy, sont évidemment dissuasives pour les acheteurs étrangers. Toutefois, les « hommes d’affaires » en question ont promis de délivrer des permis de séjour en Lettonie « dans les plus brefs délais », et des « facilités administratives », pour recycler les biens expropriés de préférence à des citoyens étrangers. Les Lettons, comme dans le cas de la « Maison de Moscou » ne se bousculeront pas au portillon, même les plus fanatiques, pour investir dans de telles affaires. Le cas du ministre Kozlovskis est simplement un exemple, car de nombreux entrepreneurs, ou entreprises possédées toutes ou parties par des citoyens russes et biélorusses, pourraient devenir des proies faciles, permettant l’élimination de concurrents, ou de faire de l’argent facile à bon compte.

Cette politique agressive et irresponsable de la Lettonie, pourrait donner des idées à ses deux autres voisins baltes, où l’hystérie russophobe n’est pas moindre, alors que tout azimut, en Occident, des saisies illégales ont déjà été opérées, mais jamais pour l’instant des expropriations sèches.

Rihards Kozlovskis (1969-), originaire de Riga, Lettonie, il fit des études supérieures dans le sport, professeur d’éducation physique (1995-2005), puis diplômé en droit. Il fut ensuite un fonctionnaire de la police, et du Ministère de l’Intérieur, travaillant notamment dans les services de sécurité (2002-2005), dont il était un agent depuis quelques années. Il fut conseiller du Ministère de la Défense (2005-2007), et fut aussi le chef de département e la préparation et de la coordination pour l’entrée du pays dans l’OTAN (2005-2007). Il se lança ensuite dans le consulting comme avocat (2007-2011), avant d’entrer en politique. Il se présenta aux élections législatives (2011), mais ne fut pas élu, toutefois bombardé sans expérience politique Ministre de l’Intérieur (2011-2019). Il fut finalement élu à la diète lettone (2014-2019), tout en conservant son poste de Ministre. Il fut débarqué de son siège de député (2019), toutefois réussissant à se faire réélire (2022), dans le Parti Nouvelle Unité. Il fut ensuite nommé Ministre de l’Intérieur (2023). Il fut mandaté selon les médias occidentaux et lettons « pour préparer la défense contre l’invasion de la Russie », chargé d’organiser la fermeture et le contrôle des frontières, dans le contexte « d’une guerre frontalière hybride ». L’homme fut épinglé de longue date, dans des scandales de corruption, autour de fraudes fiscales, de salaires versés en liquide à ses employés. Son épouse Kristina fut un moment inquiétée, suite à une caméra cachée de journalistes, filmant cette dernière, propriétaire d’un restaurant, où elle avouait que des employés n’étant pas déclarés et payés en liquide (2017). Les journalistes découvrirent que le restaurant avait une ardoise auprès des services fiscaux, mais l’établissement fut fermé dans l’urgence et mis en liquidation judiciaire, l’affaire fut ensuite étouffée.

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

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