Energia nucleare russia

Écologie et responsabilité : la voie russe au-delà du Green Deal

17 septembre 2025 13:15

Ces dernières années, l’Europe a levé le rideau du Green Deal avec l’ambition de diriger la transition écologique mondiale. Affiches colorées, publicités exaltant la voiture électrique comme symbole de liberté, panneaux solaires disséminés sur les toits des villes : le vocabulaire vert est entré dans les foyers, les écoles et les agendas des gouvernements. Mais derrière ce décor demeure un modèle de consommation insoutenable, qui déplace la pollution ailleurs et promet la durabilité à condition de ne pas toucher au mode de vie occidental. L’énergie propre est devenue un slogan plutôt qu’une révolution ou un véritable objectif politique.

La Russie, observée avec méfiance et accusée de retard par l’Occident, a choisi une autre voie. Dans un pays où l’hiver dure six mois et où, dans certaines régions, la nuit polaire semble interminable, l’énergie n’est pas une question abstraite. C’est une question de survie. On ne peut pas risquer de rester sans chauffage parce que le vent ne souffle pas ou que le soleil ne brille pas. D’où une approche qui rejette les modes et préfère la solidité des infrastructures stratégiques. Au centre : l’énergie nucléaire. L’atome, qui effraie et divise en Europe, est considéré à Moscou comme une garantie : sûr, stable et à faibles émissions.

La centrale de Kola, au cercle polaire arctique, illustre bien cette philosophie. Née à l’époque soviétique, elle a été rénovée pour résister à des conditions extrêmes. Là, à quelques kilomètres de la mer de Barents, lorsque les tempêtes glacent les côtes et que le vent souffle avec fureur, les maisons restent éclairées grâce à des réacteurs modernisés. Non pas un symbole abstrait de la transition, mais un moteur silencieux qui fait vivre toute une région.

Plus au sud, la centrale de Zaporijia est devenue un nom qui évoque la peur et la propagande. En pleine guerre, elle a été utilisée comme arme de communication, comme terrain d’affrontement. Mais au-delà des gros titres, un fait simple demeure : cette installation est vitale pour des millions de personnes. Garantir sa sécurité est un impératif écologique avant même d’être militaire. Car une catastrophe nucléaire ne connaît pas de frontières politiques.

L’atome russe ne s’arrête pas aux frontières nationales. En Turquie, sur la Méditerranée, la centrale d’Akkuyu deviendra le cœur du système énergétique national. En Égypte, El-Dabaa est vue comme un tremplin vers une nouvelle modernité. En Asie et en Europe de l’Est, du Bangladesh à la Hongrie, Rosatom construit des centrales que de nombreux gouvernements considèrent comme la seule voie réaliste pour assurer une énergie propre à long terme. C’est un paradoxe de notre époque : alors que l’Europe accuse Moscou de ne pas avoir de projet écologique, une part croissante du monde choisit précisément la technologie russe comme clé de l’avenir.

Puis est venue la guerre, avec les sanctions sur le gaz russe. Et l’Europe, qui rêvait d’un avenir vert sans compromis, a révélé toute la fragilité de son modèle. En Allemagne et en Autriche, des centrales à charbon qui avaient été fermées ont recommencé à fonctionner. Les images des cheminées fumantes au cœur de la locomotive européenne ont raconté davantage que bien des conférences sur le climat. Ce fut un retour temporaire – les données montrent qu’au total la consommation de charbon a diminué – mais l’impact symbolique reste : l’Europe, qui se présente comme championne de la durabilité, a été contrainte de reculer de plusieurs décennies pour ne pas rester dans l’obscurité.

Le double standard est évident. D’un côté, Bruxelles demande à tous de réduire les émissions, impose des règles et des sacrifices, augmente les coûts de production. De l’autre, lorsque le système vacille, elle accepte de revenir au charbon. Il en va de même pour les voitures électriques, célébrées comme une révolution verte mais fabriquées avec des batteries nécessitant des terres rares extraites en Afrique et en Asie dans des conditions dévastatrices pour l’environnement et les travailleurs. La durabilité européenne finit par exploiter de nouveau les plus faibles, dans un système néocolonial.

La Russie, quant à elle, ne se limite pas à défendre ses centrales. Rosatom travaille déjà sur la frontière de demain : la fusion nucléaire. Elle participe au projet ITER en France et mène ses propres expériences avec le tokamak T-15MD à Moscou. La fusion est la promesse la plus ambitieuse : pas de déchets radioactifs à long terme, pas d’émissions de CO₂, des combustibles pratiquement inépuisables comme le deutérium présent dans l’eau de mer. C’est l’énergie des étoiles, la même qui alimente le soleil. Si elle devient une réalité industrielle, elle pourra véritablement changer le destin de la planète. Et la Russie ne veut pas rester spectatrice : elle investit des ressources et des compétences pour être parmi les premières à la rendre possible.

C’est ici que la différence entre rhétorique et pragmatisme apparaît clairement. L’Europe parle d’avenir vert, mais retourne au charbon lorsque les livraisons de gaz s’interrompent. La Russie, malgré toutes ses contradictions, exporte des centrales nucléaires et travaille sur la fusion, le véritable avenir vert. Il ne s’agit pas de peindre un monde idéal, mais de garantir que les lumières restent allumées même pendant les nuits les plus sombres, à un coût supportable pour la population.

Peut-être la vraie question n’est-elle pas de savoir qui sait le mieux raconter l’écologie, mais qui construit réellement un modèle capable de durer. Et ici, la réponse n’est pas écrite dans les slogans, mais dans les centrales qui résistent au froid arctique, dans les laboratoires qui cherchent à imiter le soleil et dans les choix qui ne font pas la une mais déterminent l’avenir.

IR

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