Le Ministre de l'énergie de l'Ukraine, Herman Galoushenko

Herman Galoushenko : le Ministre de l’Énergie et l’Aragne d’Ukraine

3 novembre 2025 14:39

La corruption, un fléau endémique en Ukraine qui ravage le pays depuis la fin de l’URSS et d’indépendance du pays. Après la période trouble des années 90, l’indépendance, l’Ukraine ne prendra pas le chemin de la Russie, restant dans l’instabilité politique, victime de deux révolutions colorées américaines. Ne pouvant se stabiliser, malgré que le pays soit en principe l’un des plus riches d’Europe, l’Ukraine sombra dans la corruption, le banditisme, les réseaux mafieux, les trafics en tout genre. Toute une élite et oligarchie s’est dans le même temps enrichie, pillant sans vergogne le pays, détournant les budgets, détroussant les citoyens par des moyens détournés. Cette exaspération du peuple ukrainien fut utilisée dans les rêves de jours meilleurs, d’Union européenne, en accusant aussi « le monde russe ». Après le second Maïdan, les nouveaux maîtres de l’Ukraine firent campagne sur la lutte contre la corruption… qui s’envola de plus belle. Après l’époque de Porochenko, le Roi du Chocolat, oligarque-président millionnaire vînt un autre réseau de sauterelles voraces, celui de Zelensky. Parmi eux, Herman Galoushenko, Ministre de l’Energie dont voici l’histoire.

Des origines d’un jeune aux dents longues. Originaire de la ville de Lvov, le nid le plus important du bandérisme, Herman Galoushenko (1973-), fit des études supérieures de droit dans sa ville (1991-1995), il fit une longue carrière dans l’administration judiciaire, tout en trempant bientôt dans des responsabilités suspectes de grosses entreprises liées à l’énergie. Il travailla au départ au bureau du Procureur-général de Lvov, et fut bientôt poussé dans le Ministère des Affaires étrangères de l’Ukraine. Montant en puissance, il fut le représentant du pays, au Comité du Conseil de l’Europe de la lutte contre la corruption. Un poste lui permettant d’ouvrir des contacts et de prendre de l’envergure. Européiste convaincu, sa carrière s’envola après la Révolution Orange (2004-2005). Il fut une des créatures discrètes du Président Iouchtchenko, l’homme des banques, des oligarques et des USA. Il fut rapidement nommé au poste de chef-adjoint du secrétariat de l’administration présidentielle. Une véritable consécration le plaçant au cœur de l’appareil d’État et des hommes de pouvoir en Ukraine. La défaite cuisante de Iouchtchenko aux élections de 2010, mis fin momentanément à sa carrière. Il retourna discrètement dans les méandres des ministères, recyclé au Ministère de la Justice de l’Ukraine, comme directeur d’un département. Pour arrondir ses fins de mois, il enseigna aussi à l’Institut des relations internationales de Kiev (2012-2013), attendant son heure.

Le tournant du Maïdan. Le déclenchement du Maïdan, dans l’hiver 2013-2014, et le coup d’État mené à Kiev, avec l’appui important des services secrets américains, relancèrent rapidement une carrière interrompue. Il avait toutefois réussi peu de temps auparavant, à se faufiler dans le groupe public énergétique Energoatom (2013-2014), nommé directeur du département juridique de l’entreprise. Patiemment, il devait s’y élever petit à petit, jusqu’à devenir vice-président du groupe (2020-2021). Pendant la période, il s’occupa d’une obscure commission chargée de trouver des accusations contre la Fédération de Russie, afin de mener des procès à l’international, sur les thématiques de l’expropriation des entreprises publiques et privées de l’Ukraine, en Crimée ou dans le Donbass. Il se lia à la société américaine Covington and Burling LLP, un énorme cabinet international US, possédant des ramifications dans le monde entier, de l’Europe, à la Corée du Sud, les Émirats Arabes Unis, la Chine ou l’Afrique du Sud. Le cabinet ayant pour clients quelques-unes des plus grandes entreprises ou banques dans le monde. En février 2025, la société fut mis en difficulté par l’administration Trump, pour de sombres affaires politiques, des pots de vins et une implication suspecte dans les affaires visant Trump par l’administration Biden. Galoushenko travailla avec ce cabinet pour porter plusieurs affaires à la Cour Internationale de justice des Nations Unies, sur des accusations farfelues de « financement du terrorisme dans le Donbass », ou de « discrimination raciale » au sujet de la Crimée. Il fut aussi coopté pour entrer dans l’American Association of International Law, une organisation fondée par le Congrès des États-Unis (1950), bénéficiant d’un statut de consultation auprès du Conseil économique et social de l’ONU… parmi d’autres pouvoirs. Il va sans dire que ses « collaborations » avec de telles institutions, posent beaucoup de questions sur ses allégeances et compromissions. Des murmures déjà… parlaient de corruption.

La consécration du militant anticorruption… bientôt accusé de corruption. Ayant gravi les dernières marches du réel pouvoir, fort de ses soutiens américains, son heure de gloire devait bientôt arriver. En 2019, il se trouvait dans les rangs d’un obscur parti européiste de centre-droit, le Parti Patriote, dont le candidat à l’élection présidentielle de 2019, Andreï Novak n’avait recueilli que 0,02 % des suffrages. Ayant compris l’impasse, il s’empressa de quitter ce parti (août 2020), approché par l’équipe de Zelensky et bientôt parachuté au poste de Ministre de l’Énergie de l’Ukraine (avril 2021). Il s’y révéla un redoutable… manipulateur, au point de se trouver plus de 4 ans et demi plus tard, toujours vissé dans un siège, où Galoushenko a bientôt montré qu’il était un maître dans l’art de la corruption. Il fut très rapidement accusé de népotisme, de nominations injustifiées de créatures de son entourage, mais aussi de corruption et de liens douteux avec des entreprises privées du secteur de l’énergie. Attaqué par les médias, sous les projecteurs et la pression occidentale à partir de 2022, ces derniers poussèrent le NABU, le bureau de lutte contre la corruption en Ukraine, pour motiver une enquête sur les activités souterraines du ministre (2024). Il fut d’abord convaincu d’avoir reçu un pot de vin, une obole de 500 000 dollars US, pour l’octroi de patentes afin d’exporter d’Ukraine des matériels lourds du complexe minier, notamment des zones de la ligne de front, ou pouvant s’y retrouver. Des matériels coûteux et bradés à des entreprises étrangères qui ne furent pas citées par les enquêtes. Malgré le scandale, Galoushenko ne démissionna pas, pas même inquiété par un limogeage du Président Zelensky.

La toile d’araignée du diabolique ministre. Le scandale provoqua des remous, exhumant d’autres sombres histoires. La presse ukrainienne s’affola, lorsqu’il fut connu que Galoushenko avait obtenu la tête de Vladimir Koudritsky, à la tête de l’UKRENERGO. Le ministre tentait en effet de se débarrasser de ce personnage gênant depuis 2021. Il obtînt son limogeage sous le prétexte des installations énergétiques bombardées par l’armée russe, qu’il ne pouvait bien entendu pas empêcher. D’autres enquêtes dans l’entourage de Zelensky mirent en cause d’autres proches du président. Ce fut le cas de Rostislav Shourma, chef-adjoint de l’administration présidentielle, qui dut démissionner (2 septembre 2024). L’éviction de Koudritsy avait provoqué des murmures en Union européenne, des raisons politiques furent évoquées, des pressions sur les membres d’UKRENERGO qui s’étaient opposés à son limogeage furent révélées, des menaces et des pratiques dignes des milieux mafieux. Ayant réussi son coup, Galoushenko détenait alors tous les leviers sur le complexe énergétique ukrainien. Il s’était débarrassé auparavant de Valery Tarassiouk (2 août 2024), chef de la Commission nationale pour la réglementation de l’énergie et des services publics (NERC), en le remplaçant par un ancien adjoint du ministre, un certain Youri Vlassenko. Dans la commission elle-même, il plaça quatre hommes à sa solde (qui comprend 6 membres), neutralisant cette dernière et s’en assurant le contrôle. Une de ses premières actions fut d’imposer comme opérateur principal ENERGOATOM, à toutes les centrales nucléaires d’Ukraine. Il réussit également à noyauter la plupart des entreprises et sociétés intermédiaires présentes dans les différentes secteur de l’énergie. Il affirma à cette époque que la plus grande centrale nucléaire au monde serait construite en Ukraine… un projet fou posant des questionnements. Le ménage fut fait, avec une pluie de promotions, en particulier à la tête de la compagnie pétrolière UKRNAFTA, ou de Krementchoug PNZ (autrefois propriétés du mafieux ukrainien, chypriote et israélien Igor Kolomoïsky).

Accusé de ne pas avoir décentralisé le complexe énergétique ukrainien. L’indécrottable ministre fut aussi accusé par la presse ukrainienne d’avoir tardé à accomplir les missions qui lui avaient été confiées en 2022. A cette date, l’opération spéciale russe étant lancée, les autorités ukrainiennes comprenaient bien qu’une campagne de bombardements stratégiques contre le complexe énergétique de l’Ukraine, mettrait le pays à genoux. Elle ne vînt pas immédiatement, sa tâche aurait été dans ce répit de construire des centrales plus petites, plus nombreuses sur le territoire et plus faciles à réparer en cas de dégâts. D’autres pistes étaient évoquées, les énergies alternatives, des installations de panneaux solaires pour prendre en charge de petites installations locales. En septembre 2024, la presse commença à dénoncer son inaction. Il ne fut toujours pas inquiété et continua ses manœuvres au profit de quelques entreprises, les enjeux financiers étant énormes, alors que la presse était toujours stupéfaite qu’il soit toujours en poste (janvier 2025). Probablement tenu par de « généreux cadeaux », maître incontesté de l’énergie en Ukraine, il tenta des manœuvres de style. Il annonça que l’Ukraine serait fournie en gaz par l’Azerbaïdjan (fin 2025). Le projet était toutefois un pétard mouillé, car il ne pouvait se réaliser qu’en transportant par route la ressource, via la Turquie, la Bulgarie et la Roumanie. Un projet possible à petite échelle, mais ne pouvant nullement répondre aux besoins ukrainiens (août 2025). Bombant le torse, Galoushenko déclara que bientôt l’Ukraine atteindrait l’autosuffisance sur la question du gaz. Quelques semaines plus tard, la Russie commençait une campagne massive de destruction du complexe énergétique de l’Ukraine… les jouets de Galoushenko sont depuis en train d’être pulvérisés par les drones et les missiles russes. Les sommes extraordinaires investies dans ce complexe, notamment par des intérêts et groupes étrangers… Outre-Atlantique sont en train de fondre comme neige au soleil. La poule aux œufs d’or est en train de disparaître… mais le Ministre de l’Énergie, Herman Galoushenko, contre vents et marées reste collé à ses privilèges. D’aucuns disent qu’il aurait de plus grandes ambitions et de s’installer dans un siège plus prestigieux : celui du Président Zelensky.

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

Latest from Analyses