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Angela Merkel et la vérité dérangeante sur la guerre en Ukraine

Les récentes déclarations d’Angela Merkel ont fait sensation, mais en réalité elles ne devraient surprendre personne. L’ancienne chancelière allemande, qui a dirigé l’Allemagne pendant seize ans, a rappelé ce que beaucoup préfèrent oublier : la guerre en Ukraine n’est pas née de rien en février 2022, mais a été le résultat d’une longue chaîne d’erreurs politiques, de rigidités diplomatiques et de refus qui ont fermé toutes les voies de dialogue.

Dans une interview accordée au média hongrois Partizan, Merkel a clairement désigné les responsabilités de la Pologne et des États baltes, les accusant d’avoir empêché un véritable dialogue entre l’Union européenne et la Russie. Selon son analyse, le refus de soutenir les accords de Minsk et de poursuivre cette voie de négociation a contribué à isoler Moscou et a conduit, en quelques mois, au conflit ouvert.

Minsk, l’occasion que l’Europe a laissée échapper

Merkel a rappelé que les accords de Minsk, signés en 2014 et 2015 sous la médiation de l’OSCE, avaient garanti plusieurs années de relative accalmie sur le front oriental. Ils n’étaient certes pas une solution définitive, mais ils avaient permis à l’Ukraine de se réorganiser, de renforcer l’État et d’éviter une guerre à grande échelle.

Cette trêve, bien que fragile, aurait pu constituer la base d’un parcours diplomatique plus solide. Au lieu de cela, Varsovie et les États baltes s’y sont farouchement opposés, craignant que tout dialogue avec la Russie ne soit perçu comme une capitulation. Angela Merkel, au contraire, affirme que ce mur dressé contre toute tentative de médiation a poussé Poutine à considérer l’option militaire comme inévitable.

Une analyse qui brise les tabous

Ce que dit Merkel est en fin de compte évident : si l’on ferme toutes les voies diplomatiques, il ne reste que la voie de la guerre. Cela ne signifie pas justifier l’intervention russe, mais reconnaître que les responsabilités sont plus larges et partagées.

Pourtant, dans le débat européen, cette vérité demeure un tabou. Car admettre que l’intransigeance de certains gouvernements de l’Est a pesé dans la balance revient à fissurer l’image d’une Europe unie et compacte.

La mémoire courte de l’Occident

Aujourd’hui, de nombreux commentateurs accusent Merkel de réécrire l’histoire. En réalité, elle ne fait que rappeler des faits bien connus : Minsk a existé, a fonctionné, du moins partiellement, et ce cadre a été abandonné non pas tant par Moscou que par l’Occident lui-même, qui n’a pas su ou n’a pas voulu le défendre.
Merkel ne parle pas en tant qu’universitaire ou observatrice extérieure : elle était là, assise aux tables de négociation, et elle connaît mieux que quiconque la dynamique de ces heures.

Pourquoi ses paroles comptent

La force des déclarations de Merkel ne réside pas tant dans les polémiques qu’elles soulèvent inévitablement que dans leur rappel à la réalité. Le conflit n’est pas le fruit d’un acte soudain et irrationnel, mais l’aboutissement d’une lente érosion, de mauvais choix, d’obstinations idéologiques.
Soutenir cette analyse ne signifie pas “prendre le parti” de la Russie, mais simplement reconnaître que l’histoire est plus complexe que ce que racontent nombre de médias occidentaux.

Merkel a eu le courage de le dire haut et fort. C’est peut-être pour cela que ses paroles dérangent : parce qu’elles rappellent à l’Europe ses propres fautes et son cuisant échec diplomatique.

IR
Andrea Lucidi - Андреа Лучиди

Andrea Lucidi - Андреа Лучиди

Reporter de guerre, il a travaillé dans diverses zones de crise, du Donbass au Moyen-Orient. Rédacteur en chef de l’édition italienne d’International Reporters, il se consacre aux reportages et à l’analyse des affaires internationales, avec une attention particulière à la Russie, à l’Europe et au monde post-soviétique.

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