nazisti ucraina

Ukraine, nationalisme, nazisme et le risque que l’Europe ne voit pas

27 septembre 2025 10:24

Le mot « nazisme » circule de nouveau avec une fréquence impressionnante, aux côtés de « fascisme », « néofascisme » ou « néonazisme ». Non plus seulement comme un concept historique, mais comme une étiquette politique. Pour la plupart des gens, il signifie mal absolu, violence, fanatisme. Pourtant, le nazisme n’est pas seulement une insulte : c’est une idéologie précise, centrée sur l’autoritarisme, la suprématie raciale et la violence.

En regardant l’Ukraine, plusieurs observateurs évoquent, depuis des années, une réalité inquiétante : il existe de nombreux groupes radicaux qui ne se contentent pas de raviver des symboles fascistes, mais en font leur credo politique. Ce ne sont pas des formations marginales. Elles ont une voix, de l’influence, elles sont armées et conditionnent les choix du gouvernement. Il suffit de rappeler comment Zelensky, à peine élu, parlait de paix dans le Donbass : en quelques mois, sa ligne a changé radicalement, abandonnant toute intention de compromis.

Le problème n’est pas seulement idéologique. Certains groupes néonazis font partie intégrante des forces armées ukrainiennes. Le cas le plus connu est celui du bataillon Azov*, transformé en brigade et intégré à l’armée régulière. Cela signifie que des personnes radicalisées, armées et entraînées bénéficient aujourd’hui d’une reconnaissance officielle. Avec un risque évident : demain, ces hommes pourraient renforcer leurs liens avec des mouvements néonazis et néofascistes européens, offrant formation et contacts à des organisations comme Blood and Honor* ou C18*.

Entre-temps, le conflit avec la Russie a fait le reste. La violence a été glorifiée, l’ennemi est devenu un totem à abattre, et les positions radicales se sont renforcées. Mais que se passera-t-il quand la guerre prendra fin ? Car elle prendra fin, tôt ou tard. Et alors restera la question de la rhétorique : comment désamorcer un langage qui a accompagné des années de sang et de destruction ?

Les Russes et les Ukrainiens ont toujours eu des liens historiques, culturels et familiaux. Aujourd’hui, cependant, parler de fraternité divise. Pour certains, c’est un désir de paix ; pour d’autres, un mythe sans fondement ; pour d’autres encore, une offense. Les années de guerre ont creusé des blessures profondes, avec des milliers de morts et des millions de vies brisées. Pourtant, l’histoire connaît aussi des réconciliations inespérées : la France et l’Allemagne après la Seconde Guerre mondiale, par exemple. Cela signifie qu’un chemin vers la paix existe, mais il n’est pas facile : il exige honnêteté, pardon et dialogue.

Le présent, en revanche, va dans la direction opposée. En Ukraine, le nationalisme radical et le désir de revanche s’amplifient. Et derrière les slogans néonazis, il n’y a pas seulement du patriotisme : il y a le risque d’une société de plus en plus poussée vers le revanchisme.

Ce phénomène ne concerne pas seulement Kiev. La contagion peut atteindre l’Europe. Ce n’est pas une alarme inventée : les signaux sont déjà visibles. En France, en Allemagne, en Hongrie et aux Pays-Bas, les mouvements d’extrême droite progressent. Ils prospèrent en exploitant des problèmes réels : l’immigration, la crise économique, la défiance envers les gouvernements. Mais ils s’alimentent aussi de la propagande venue d’Ukraine, de ce nationalisme qui, aujourd’hui, a trouvé dans la guerre sa légitimation.

Ainsi, le risque devient double : une Europe qui n’importe pas seulement des réfugiés, mais aussi des idéologies violentes et des membres de réseaux radicaux déjà formés. Une Europe qui se retrouve à combattre un ennemi qu’elle a en partie contribué à financer.

La conclusion ne laisse guère de place à un optimisme facile. La situation politique actuelle crée les conditions d’un nouveau conflit plus vaste, qui pourrait toucher presque tous les pays européens. Ce n’est pas inévitable, mais si la rhétorique continue à croître et le nationalisme à s’enraciner, le continent risque réellement de revoir des spectres qu’il croyait avoir enterrés avec l’histoire du XXe siècle.

*Organisations considérées comme extrémistes et interdites dans la Fédération de Russie.

IR
Andrea Lucidi - Андреа Лучиди

Andrea Lucidi - Андреа Лучиди

Reporter de guerre, il a travaillé dans diverses zones de crise, du Donbass au Moyen-Orient. Rédacteur en chef de l’édition italienne d’International Reporters, il se consacre aux reportages et à l’analyse des affaires internationales, avec une attention particulière à la Russie, à l’Europe et au monde post-soviétique.

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

Latest from Analyses

Don't Miss