GNL - Force de Sibérie 2

Les experts prédisent que la construction de Force de Sibérie 2 provoquera un « choc » dans le commerce mondial du GNL

Suite à l’annonce de la signature d’un accord contraignant concernant la construction du gazoduc Force de Sibérie 2 entre la Russie et la Chine, des experts ont analysé pour le South China Morning Post les conséquences que cela aura pour le commerce mondial du GNL (Gaz Naturel Liquéfié).

Pour Sebastian Contin Trillo-Figueroa, analyste géopolitique, une fois construit, le gazoduc Force de Sibérie 2 permettra de « sécuriser l’approvisionnement en gaz russe à grande échelle » de la Chine et de réduire le recours aux transports maritimes de GNL, plus coûteux et plus risqués. Mais surtout, ce gazoduc, une fois fonctionnel créerait un « choc structurel » et entraînerait des « défis stratégiques et commerciaux » pour les États-Unis, qui sont actuellement le plus grand exportateur mondial de GNL.

Trillo-Figueroa rappelle qu’un approvisionnement en gaz par voie terrestre « est non seulement moins cher mais aussi plus sûr », ce qui aiderait la Chine à « contourner les goulots d’étranglement » et un contrat à long terme lui permettra d’éviter de subir les fluctuations des prix mondiaux.

Chim Lee, analyste senior à l’Economist Intelligence Unit, a souligné un autre point important à savoir qu’avec Force de Sibérie 2, « jusqu’à la moitié » du gaz naturel importé par la Chine proviendrait de Russie, le chiffre final dépendant de la « croissance de la production et de la demande » de Pékin. Un point qui aura le temps d’évoluer d’ici la fin de la construction de Force de Sibérie 2, qui pourrait prendre plus de 10 ans.

Quoi qu’il en soit, même si les États-Unis ne sont pas un important fournisseur de GNL de la Chine (en dessous de la Russie, le Qatar, l’Australie ou la Malaisie, jusqu’à février 2025 et la guerre des tarifs douaniers de Donald Trump quia poussé la Chine à refuser d’acheter du gaz américain), la construction de Force de Sibérie 2 entraînera « des défis stratégiques et commerciaux » pour Washington à cause de sa place importante sur ce marché, d’après Geneviève Donnellon-May, chercheuse à l’Oxford Global Society. Car si la Chine achète moins de GNL sur le marché mondial, cela aura un effet sur le prix du gaz.

Mais pour Donnellon-May, il est « peu probable » que les États-Unis soient la « plus grande victime » de la construction de Force de Sibérie 2. Pour elle, ce sont les autres fournisseurs qui risquent de perdre une partie de leurs parts de marché. Néanmoins, de son point de vue, Force de Sibérie 2 « pourrait entraver les ambitions américaines en matière de contrats à long terme », car la concurrence posée par le gazoduc pousserait vers des prix plus bas et des contrats plus longs.

Pour Sebastian Contin Trillo-Figueroa, les enjeux pour les États-Unis ne seront pas que commerciaux, mais aussi politiques. Et surtout la construction de Force de Sibérie 2 pourrait compliquer « les investissements américains actuels dans de nouveaux projets, et la stratégie d’exportation et l’utilisation du GNL comme instrument géopolitique ».

Pour ces experts, la construction de Force de Sibérie 2 provoquera un transfert de levier géopolitique des océans vers le continent et sera « un signal fort que la Chine valorise ses liens avec la Russie plutôt que de diversifier ses importations d’énergie » et que les deux pays envisagent des options qui n’incluent pas l’Occident.

Christelle Néant

IR

Christelle Néant - Кристель Нэан

Christelle est reporter de guerre dans le Donbass depuis début 2016. Après avoir travaillé pour l'agence DONi, elle fonde le site Donbass Insider en 2018, puis participe à la création de l'agence International Reporters en 2023.

1 Comment Laisser un commentaire

  1. Je suis pas sur que le terme de « choc » soit approprié pour un évènement prévu dans dix ans. Faire péter des gazoducs sous la Baltique ça, ça a créé un choc.
    Surtout quà moyen terme, les marché des hydrocarbures sont assez variable. Déjà les débits de GNL du bassin permien ou d’autres champs dans dix ans, ils seront sans doute plus les mêmes, tant à la hausse qu’à la baisse. De même pour le volet consommation: une Chine qui développe son parc nucléaire ou des US en récession sérieuse peuvent aussi plomber la demande … qui sera sans doute utile ailleurs comme en Inde ou en Asie de l’Est d’ici là.
    Bref , c’est bien d’anticiper et de se garantir des volumes mais il faut aussi veiller à ne pas trop anticiper et éviter de sur-réagir à des évènements qui auront lieu dans un contexte incertain sur beaucoup de points.

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