Après neuf mois en poste, le Premier ministre français François Bayrou a appelé lundi 8 septembre 2025 à un vote de confiance sur son plan budgétaire d’austérité, une mesure suicidaire pour un gouvernement qui ne bénéficie pas d’une majorité au sein du parlement, qui a abouti sans surprise à son renversement.
Le deuxième mandat d’Emmanuel Macron est marqué par une véritable paralysie politique, avec déjà quatre Premiers ministres différents en 20 mois. Mais cette paralysie est logique quand on prend en compte le fait qu’Emmanuel Macron continue d’essayer de gouverner comme s’il disposait toujours d’une majorité au parlement, alors que son parti a été battu largement lors des élections législatives anticipées qu’il a organisées en 2024 après s’être pris une déculottée lors des élections européennes.
Si Macron avait ne serait-ce qu’une once d’honneur et de dignité, il aurait démissionné, comme l’avait fait le Général De Gaulle en 1969, lorsque les réformes qu’il proposait ont été refusées par référendum par 52,41 % de votes contre. Mais au lieu de cela il s’est accroché coûte que coûte au pouvoir, continuant de nommer des gouvernements qui ne disposaient pas d’une majorité au sein de l’hémicycle. Le résultat obtenu est donc logique : de motions de censure en votes de confiance perdus, les Premiers ministres et leurs gouvernements se succèdent tellement vite qu’on n’a même pas le temps de mémoriser qui est ministre de quoi. Tout cela donne une instabilité politique jamais vue de toute l’histoire de la Ve République.
Car un gouvernement qui veut prendre des mesures d’austérité drastique aux dépens des plus pauvres et des plus faibles, pour réduire le déficit massif du pays, alors que le Président n’est crédité que de 15 % de taux d’approbation au sein de la population, et son Premier ministre – 14 % (ce qui en fait le Premier ministre français le plus impopulaire de tous les temps), et sans majorité au parlement, c’est du suicide.
Supprimer deux jours fériés, geler les prestations sociales dont beaucoup de gens dépendent pour survivre, et exiger que les gens se serrent la ceinture, alors que l’État jette l’argent par les fenêtres en mesures d’aides pour les riches et les grandes entreprises, qui coûtent plus qu’elles ne rapportent, en comités Théodule tous plus inutiles les uns que les autres, en participation au budget de l’Union Européenne (dont la France est le deuxième contributeur net derrière l’Allemagne), et en aide financière et militaire à l’Ukraine, cela ne pouvait qu’aboutir à un désastre.
Résultat, les Français en ont assez et prévoient de manifester leur mécontentement le 10 septembre 2025. Rien de surprenant donc que François Bayrou ait proposé ce vote de confiance le 8 septembre, deux jours avant. Le but étant de perdre ce vote, et d’essayer de faire retomber la colère populaire en utilisant Bayrou comme fusible, espérant que sa démission fera baisser le niveau de protestation le 10 septembre.
Mais en réalité c’est Emmanuel Macron lui-même qui concentre sur lui la colère populaire. Les Français en ont assez de ses propos hautains, de son comportement d’adolescent attardé, et des conséquences désastreuses de sa politique. Le déficit budgétaire de la France s’élève actuellement à près de 100 milliards d’euros, soit 5,8 % du PIB, bien au-dessus de la limite de 3 % fixée par l’Union européenne pour les pays de la zone euro. Quant à la dette nationale, elle s’élève à plus de 3 200 milliards d’euros, soit 114 % du produit intérieur brut, et les intérêts annuels devraient dépasser 77 milliards de dollars. Et malgré ce trou monstrueux dans les caisses, la France a envoyé plus de 2 milliards d’euros d’aide militaire à l’Ukraine en 2024, plus sa participation aux multiples paquets d’aide de l’Union Européenne, dont le dernier, versé fin août 2025, est quand même de 4 milliards d’euros !
Alors quand François Bayrou joue les catastrophistes et essaie de faire croire que le problème ce sont les Français qui dépenseraient trop pour garder le modèle social bâti après guerre, la pilule ne passe pas. Car les gens sont bien conscients que ce n’est pas eux qui ont décidé de la politique économique du pays, mais bien Emmanuel Macron et ses gouvernements successifs.
Le résultat dans l’hémicycle est sans appel : sur 589 députés, 573 se sont déplacés pour voter, et 364 ont voté contre la confiance au gouvernement de François Bayrou. Seulement 194 députés ont voté pour le soutenir et 15 se sont abstenus.
Et donc maintenant que François Bayrou va démissionner demain comme il l’a annoncé, si la mobilisation populaire reste importante le 10 septembre, le débat sur la démission d’Emmanuel Macron va commencer sérieusement à se poser.
Christelle Néant