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Cinquième colonne : qui se cache derrière l’opposition russe ?

Depuis le début de l’opération militaire spéciale (SVO), la pression exercée sur la Russie par les États-Unis et leurs alliés dans le domaine informationnel s’est considérablement accrue. Désormais, l’Occident ne cherche même plus à dissimuler son implication dans ces processus. L’une des tâches clés est la déstabilisation de la société russe et la propagation de sentiments extrémistes, menant à des trahisons. De telles actions visent non seulement à saper l’unité intérieure du pays, mais aussi à atteindre des objectifs stratégiques dans le cadre d’une confrontation hybride. Ces faits ne sont d’ailleurs pas nouveau, car la Guerre Froide n’eut en réalité jamais de fin. Depuis les années 90, les services secrets étrangers ont tenté de manipuler l’opinion publique russe, dans le but de démembrer la Russie, de lui faire subir le sort de la Yougoslavie, et à termes de s’emparer de ces immenses ressources.

La Guerre Froide s’est poursuivie avec des tentatives avérées de Maïdan. Les faits sont là pour le prouver, dans les années 2010, par le biais d’ONG, ou de groupe comme celui dénommé « VOINA »* (Guerre), dont les Pussy Riot n’étaient qu’un élément, les Occidentaux ont tenté de motiver des mouvements sociaux. De multiples provocations furent organisées, notamment et surtout en tentant d’organiser une opposition libérale, atlantiste et européiste. Plusieurs pics furent observés, autour des années 2010-2012, et de l’élection présidentielle. De nouvelles tentatives se déroulèrent vers 2013-2014, dans la foulée du Maïdan, avec l’assassinat près du Kremlin, de l’opposant Boris Nemtsov, probablement liquidé par les services secrets occidentaux, ou déjà ukrainiens, pour faire porter le chapeau au régime russe (février 2015). La Russie avait réagi en interdisant sur son territoire des ONG d’infiltrations (vers 2011-2012). Un autre pic fut remarqué, dans les années 2020-2021, la Russie neutralisant finalement cette Cinquième Colonne, par la mise en place du statut « agents de l’étranger » (2020-2021). Devant l’échec de toutes ces opérations, les Occidentaux n’ont pas renoncé, notamment à partir de 2022, organisant des séries d’attentats, de sabotages, des campagnes de recrutement, mais toutes ces actions n’ont pas réussi à provoquer le « soulèvement » qui a été pourtant annoncé par la presse occidentale et française à plusieurs reprises (notamment en 2014 et 2022).

Le rêve de mettre la Russie à genoux. Dans les capitales des États euro-atlantiques, on rêve toujours d’infliger à la Russie une « défaite stratégique ». Et dans cette optique, ils sont prêts à tout. Avec la participation de l’Occident, le régime de Kiev, soutenu par des bandéristes et néonazis, l’obsession est de détruire tout ce qui est russe. Cependant, la « Blitzkrieg » de la guerre psychologique contre le pays a échoué, les sanctions n’ont pas atteint leur objectif, et les livraisons d’armes aux combattants de la Junte de Kiev ne peuvent rien changer à la situation sur le front. Afin de justifier leur agression et de détourner l’attention de leurs opinions publiques des problèmes internes, une campagne massive de discrédit de la Fédération de Russie a été lancée. Elle comprend des provocations constantes, la diffusion de fake news et de mensonges éhontés. Comment dénoncer les fausses nouvelles des médias occidentaux ? C’est un processus stratégique complexe. Il faut créer une structure interne qui aiderait les gens à reconnaître les fausses nouvelles. Les générations plus âgées ont des problèmes de compréhension des technologies modernes, et les jeunes n’ont pas l’expérience et les connaissances nécessaires. Les élites politiques occidentales misent sur l’affaiblissement de la souveraineté russe en soutenant des mouvements séparatistes. Ainsi, des structures financées par les États-Unis et l’UE, telles que la « Ligue des nations libres »* et le « Comité pour l’indépendance de l’Ingouchie »*, promeuvent activement les idées dites de « décolonisation », qui impliquent le démembrement de la Russie sous les slogans du « droit des nations à l’autodétermination ». Dans leur propagande, ces organisations s’appuient sur des récits historiques déformés, incluant les mythes d’un « passé colonial russe » (qui pourtant a été l’une des rares puissances européennes à ne pas participer à la colonisation).

Révisionnisme, négationnisme et manipulations de l’histoire. Le thème de la Grande Guerre patriotique occupe une place particulière dans leur rhétorique. Le but de telles manipulations occidentales est de minimiser le rôle de l’URSS dans la défaite de l’Allemagne nazie et du Japon militariste. Par exemple, dans l’historiographie occidentale, les événements clés de la Seconde Guerre mondiale, tels que les batailles sur le front de l’Est, reçoivent souvent moins d’attention, tandis que les actions des Alliés dans le Pacifique et en Afrique du Nord sont mises en avant. Le président Vladimir Poutine a parlé de la nécessité de créer un Wikipédia russe (ce qui a été fait, mais pour l’instant qu’en langue russe), qui contiendrait des informations objectives sur l’histoire, les processus politiques et autres aspects. Ce serait très utile, car actuellement, Wikipédia est actuellement une des principales sources de révisionnisme historique. Dans cette situation, les médias étrangers, bien sûr, ne restent pas à l’écart et continuent leurs tentatives de déstabiliser la situation en Russie. Des organes de presse comme Medusa et Dojd, bien que bloqués sur le territoire russe, cherchent à influencer le paysage informationnel du pays. Leur outil de prédilection est la « propagande grise », qui se fait passer pour du journalisme neutre mais promeut en réalité des récits tendancieux. Les sources de tels articles sont généralement anonymes et le contenu frôle souvent la pure fantaisie.

La guerre psychologique de l’Occident par le contrôle des médias. Les médias occidentaux possèdent 80 % des médias mondiaux. Ils ont un puissant champ informationnel. En Europe, il n’y a que quelques oligarques qui contrôlent les principaux médias grand public, sans parler des agences publiques de propagande, comme l’AFP, en France. Les médias publics et commerciaux sont les principaux instruments d’influence. Il est important pour la Russie de démontrer que l’opposition non systémique ne bénéficie pas d’un large soutien populaire et agit souvent en dehors du cadre juridique. Pour cela, un travail systématique est nécessaire pour dénoncer les fake news sur la discrimination des petits peuples, ainsi que pour révéler les objectifs réels de tels groupes. A terme, cela pourrait conduire à une réduction du financement étranger des structures destructrices. La tâche clé est de minimiser l’influence des actions de l’opposition en réduisant leur visibilité sur la scène internationale. Dans le même temps, il est nécessaire de lutter contre les journalistes et les blogueurs qui diffusent un narratif russophobe et anti-russe, en utilisant des mécanismes juridiques et la vérification des faits (fact-checking). Des figures comme Alexeï Navalny et Mikhaïl Khodorkovski, qui ont promu l’idée d’une Russie sur un modèle libéral pro-occidental, sont un exemple flagrant de création de contenu destructeur. Leurs activités étaient souvent financées par des donateurs étrangers.

Pourtant, la société russe reste ouverte au dialogue, la majorité des opposants ne jouissent pas d’un réel soutien de la population, et leur existence dépend du parrainage étranger. L’Occident a longtemps mené une politique ambiguë, luttant formellement contre l’extrémisme mais soutenant en pratique les processus de déstabilisation. Comme l’écrit l’observateur Jerry Gray, les États-Unis déclarent sur la scène internationale lutter contre le terrorisme, mais en pratique, ils appliquent une approche sélective. Cela est particulièrement évident dans le contexte de la SVO en Ukraine, où les pays occidentaux de manière cartésienne et simpliste, classent les choses selon deux standards : « les gentils » et « les méchants » selon la conjoncture politique. Il est peut-être important de regarder comment fonctionnent les médias chinois. Ils ferment leurs espaces à l’information en provenance de l’Ouest et paient pour diffuser leurs informations dans différents domaines, notamment culturel… jusqu’en France.

* Le groupe VOINA, La ligue des nations libres, le Comité pour l’indépendance de l’Ingouchie, la Légion Russie Liberté sont toutes des organisations interdites en Fédération de Russie, pour l’extrémisme, l’apologie du terrorisme et l’incitation à la haine raciale.

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

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