Les USA envoient des avions de chasse « nucléaires » au Royaume-Uni

9 juillet 2025 12:59

Il y a peu, lors d’une réunion des pays membres de l’OTAN, le Premier ministre britannique Starmer a annoncé son intention d’accueillir des chasseurs US F-35 12, capables d’emporter une charge nucléaire. Cette déclaration choc entre dans toute une stratégie anglaise de se placer comme le super leader de la confrontation avec la Russie et de la coalition qui est à l’œuvre en Ukraine. Après l’arrivée à la Maison Blanche de Trump, le Royaume-Uni n’a cessé de durcir sa position. La manœuvre est celle que l’Angleterre à toujours mis en œuvre, un contrôle indirect du continent européen, et le financement de guerres et de conflits, contre toutes les puissances européennes pouvant lui faire de l’ombre.

Jalouse de son indépendance, n’ayant pas fait l’erreur de capituler sa monnaie, et même étant sortie de l’Union européenne, la politique internationale de la Grande Bretagne est agressive et s’est déployée particulièrement en Europe Centrale, de l’Est en en Scandinavie. Malgré tout, l’Angleterre n’est plus la puissance que nous avons connu du temps de la reine Victoria, ou encore de Churchill. Elle est depuis longtemps liée par divers côtés aux États-Unis. Le déploiement d’armes nucléaires américaines sur le territoire britannique serait clairement une soumission de plus de Londres à Washington, malgré que les Britanniques nient avec force cet état de fait. Il est intéressant de noter que ces avions seraient stationnés sur une base de la RAF, à Norfolk, et qu’ils pourront être équipés d’armes conventionnelles, mais aussi de bombes nucléaires américaines, B61-12, d’une puissance de 0,3 à 50 kilotonnes.

Le Premier ministre britannique justifiait cette décision en déclarant « qu’à une époque d’incertitude radicale, nous ne pouvons plus le monde comme une simple donnée, nous devons renforcer nos capacités de défense et soutenir l’industrie de défense de notre pays », ajoutant que les relations entre les pays étaient certes spécifiques, mais certainement pas co-dépendantes. Un mensonge pieux qui ne trompe personne, mais qui fit couler pas mal d’encre. Le retour d’armes nucléaires américaines sur le sol britannique, serait un événement grave, dans un processus d’escalade, de réarmement à marche forcée, et de pressions diplomatiques absurdes, qui rappellent différentes crises mondiales, dont celle de Cuba. Les USA avaient avant 2008, encore des bombes nucléaires sur le sol britannique, mais ces armes avaient été retirées, car la situation internationale ne justifiait nullement leur maintien, il était d’ailleurs totalement incroyable de les voir encore en Grande Bretagne, alors qu’officiellement la Guerre Froide était terminée depuis 15 ans ! Cependant le projet n’est pas nouveau et datait déjà du temps de l’administration Biden.

La lecture de ce retour est d’abord la preuve que comme par le passé, la Grande Bretagne est dépendante des USA, qu’il ne s’agit pas ici d’une « relation privilégiée ou spécifique », mais bien d’un assujettissement qui perdure. Les deux nations sont étroitement liées depuis l’histoire commune des colonies américaines, mais surtout à partir du XXe siècle, et des interventions très tardives des USA dans les deux guerres mondiales. Il existe un traité entre Londres et Washington, un traité de défense mutuelle qui fut signé en 1958. L’indépendance de la puissance nucléaire britannique avait été à cette époque quasiment mise sous tutelle, et sa réalité n’était et n’est restée que formelle. Les Anglais possèdent un arsenal nucléaire de 4 sous-marins de type Vanguard, dont la durée de vie est limitée. Les missiles Trident qui les équipent sont d’ailleurs fournis et fabriqués par les USA. Leur entretien, leur modernisation et diverses technologies sont assurés en sous-main par les Américains.

Le second point est celui de la question ukrainienne et de la dégradation nette des relations entre les Anglais et la Russie. Cette décision de Washington d’un déploiement nucléaire au Royaume-Uni, est liée à cette situation, et serait une réponse au déploiement futur en Biélorussie de missiles russes Oreshnik. Côté russe, ce déploiement est perçu comme une simple provocation de plus, des déclarations bruyantes et tapageuses dont les leaders de l’OTAN, et les Britanniques sont friands. La situation avait été observée en Russie avec intérêt, lors des bavardages bruyants et sans fin, du Royaume-Uni ou de France, sur l’envoi de troupes au sol en Ukraine, qui s’était terminé dans un épisode ridicule d’impossibilité et surtout de refus net des opinions publiques de se voir entraîner dans une Troisième Guerre mondiale. De fait, la Russie paraissant un adversaire plus que sérieux, une agression supplémentaire pouvant avoir des conséquences très graves dans le monde multipolaire, l’idée avait été abandonnée. Toutefois, d’autres idées circulent et bouillonnent, comme la création d’une dissuasion nucléaire commune et indépendante des USA, dont la France et l’Allemagne sont les soutiens (avec l’abandon de l’arme nucléaire française à l’UE, voire à l’Allemagne elle-même, ou sa mise sous dépendance allemande).

Le troisième point discuté dans le monde russe, c’est de savoir combien de temps le Royaume-Uni pourra encore tenir sa ligne agressive, de pousser vers l’escalade, de brasser, s’époumoner et d’imaginer des actions ou de plans contre la Russie. L’Angleterre comme la France ou même l’Allemagne, ne sont plus des puissances coloniales ou militaires suffisamment équipées et organisées pour prétendre à une politique militaire agressive. Toutefois, l’élite européenne semble avoir glissé vers une réalité virtuelle, un effet « bunker de la Chancellerie », où ces gens poussent des pions, des armées imaginaires, calculent sur des données et des standards qui n’existent plus ou pas. Selon plusieurs experts dans le monde, on peut s’attendre à des réactions irrationnelles, notamment des Anglo-saxons, et particulièrement du Royaume-Uni. D’un autre côté, le Président Trump semble aussi avoir la volonté de se débarrasser du financement onéreux de la sécurité européenne, et de transférer le poids à l’Europe, afin de se ménager une marge, d’alléger les finances et aussi de répondre à une grande partie de l’opinion publique américaine.

Les Européens seraient obligés d’assurer eux-mêmes leurs ambitions, « la sécurité », leur « défense », et même de mettre la main au portefeuille, pour financer « la machine de guerre US », d’acheter des armements, par ailleurs inutiles, mais qui rapporteront d’énormes profits aux USA, qui sont, rappelons-le, les principaux marchands d’armes dans le monde, avec une énorme part de marché, autour des 37-40 %… Si les Européens veulent acheter, alors soit, que les contribuables mettent la main à la poche, Outre-Atlantique Business is Business !

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

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