Norvège : élections, forces en présence, l’influence majeure des USA

La Norvège est en passe de connaître un changement politique, alors que des élections s’annoncent dans le pays. Elles auront lieu le 8 septembre prochain, et elles pourraient redistribuer radicalement les cartes dans le pays. Le pays fut l’un des fondateurs historiques de l’Alliance Atlantique Nord (OTAN), en 1949, avec la Belgique, le Canada, le Danemark, la France, l’Islande, l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, le Royaume-Uni et les USA. De longue date des bases de l’OTAN y furent installées, et l’influence américaine y fut toujours grande, remplaçant petit à petit, celle historique du Royaume-Uni. Cependant, la Norvège s’est refusée jusqu’alors à entrer dans l’Union européenne, se tenant sagement à l’écart, mais est entrée dans l’espace Schengen peu après sa création (1996). Pays stratégique, qui fut envahi par l’Allemagne nazie en 1940, la Norvège possède une vaste façade maritime et des bases navales proches du Grand Nord, et autrefois de l’URSS, le pays ayant aussi une frontière avec la Russie contemporaine. Son territoire fut utilisé par l’OTAN dans la « guerre secrète » durant la Guerre Froide et n’a cessé de jour un rôle contre la Russie. Enfin, fait peu connu, la Norvège possède un complexe militaro-industriel et produit notamment des munitions, qui sont envoyées en Ukraine, le pays étant totalement sous l’emprise de la propagande ukrainienne.

Un pays en pointe dans le soutien à l’Ukraine. Petit pays par sa population et son poids dans l’histoire européenne, la Norvège tient toutefois depuis le XXe siècle une place importante dans la stratégie anglo-saxonne. Par sa position géographique, sa proximité avec la Russie, mais aussi de points de passage maritime sur la Mer du Nord, la Baltique ou l’accès aux mers « froides » du Grand Nord, elle est tenue fermement politiquement, et sa population manipulée. L’un des curseurs est aussi le Prix Nobel pour la Paix, qui contrairement aux autres qui sont remis en Suède, celui de la paix est remis traditionnellement par le roi de Norvège (depuis 1905). Les derniers prix, manipulés en profondeur, ont été remis à des transfuges et opposants russes ou biélorusses (2021 et 2022), ou encore à l’Ukraine (2022), ou à des figures poussées en avant par l’Occident, dans le travail de sape dans certains pays (Iran, Irak, Tunisie, Pakistan, Yémen, Chine, etc.), ou carrément à des fauteurs de guerre (Obama en 2009, Al Gore en 2007 ou Jimmy Carter en 2002). Le pays abrite également de nombreuses bases de l’OTAN, et en a ouverte dernièrement une nouvelle (2024), en plus d’exercices d’importance des forces militaires atlantistes sur son territoire. De fait, depuis les élections de 2021, le pays est dirigé par le chef du Parti travailliste, parti du centre et socialiste (gauche Caviar), qui détient pour l’instant la majorité au parlement. Le gouvernement a donc mené une politique agressive à l’encontre de la Russie, et un soutien total à l’Ukraine. Fait également méconnu, la Norvège a été l’un des plus importants financiers de la boucherie en Ukraine, se plaçant en 7e position mondiale (1 USA, 2 Allemagne, 3 Royaume-Uni, 4 Danemark, 5 Union européenne, 6 Pays-Bas, 7 Norvège, 8 Pologne, 9 Canada et enfin 10 Suède). C’est donc un pion d’importance pour les Anglo-saxons dans la guerre par « intérim » contre la Russie, alors que le pays se militarise dans le même temps.

Des élections avec des enjeux majeurs. De ce fait, malgré l’arrivée de Trump, et le remplacement comme chef de file dans l’obstination à mener une guerre contre la Russie, c’est le Royaume-Uni qui est aujourd’hui en tête. Le pays a de longue date entretenu des relations privilégiées avec la Norvège, et pour continuer le financement de la guerre en Ukraine, il faudra convaincre et continuer de trouver de l’argent. Les pays scandinaves sont une manne, avec des économies en meilleure santé que celles des pays de l’Europe de l’Ouest, qu’il faudra donc maintenir dans cette ligne à tout prix. Le pays s’est trouvé aussi subitement menacé par des déclarations du Président Trump, avec sa volonté d’annexion du Groenland, mais surtout du groupe d’îles du Svalbard, qui sont territoire norvégien. En réponse, le Premier ministre norvégien avait déclaré sur les ondes de la télévision nationale : « que le Svalbard était sous le contrôle d’Oslo, et que ses menaces étaient inacceptables à l’encontre d’un pays allié ». Les déclarations de Trump ont choqué profondément l’immense majorité de l’opinion publique norvégienne, alors que les analystes se sont penchés sur les raisons de ce début de revendications américaines à l’encontre de la modeste Norvège. L’Institut suisse des relations internationales suggérait que les États-Unis pourraient revendiquer le Svalbard pour contrer également la Chine, cherchant à s’installer dans le Grand Nord. Pékin s’intéresse en effet de longue à la création de nouvelles routes commerciales, pour lui permettre de continuer à inonder le monde de ses marchandises. La zone est régentée par le Traité du Spitzberg (1920-1925), qui a reconnu la possession de l’archipel à la Norvège, lui imposant de ne pas autoriser l’installation de bases militaires. L’URSS avait signé le traité dès l’année 1924, mais la Fédération de Russie ne l’a pas confirmé. Le problème et que cet archipel quasiment inoccupé par l’homme (2 600 habitants), comporte une population norvégienne et dans le Svalbard occidental, une population russe. C’est la raison de fortes tensions qui se sont exacerbées en 2022, et qui ont démarré en 2011. La Norvège a protesté de l’installation de citoyens russes (historiquement présents bien avant la signature du traité), qui ont fondé le village de Barenzburg, et contre la visite du Vice-premier ministre russe Rogozine dans cette localité (2015). C’est sans doute ce qui a motivé également les USA à vouloir confisquer le Svalbard, alors que le pays mène aussi une politique agressive dans l’Arctique, avec l’ambition finale de s’emparer de la zone et de ses immenses réserves et ressources naturelles. Les électeurs répondront donc en septembre par les urnes, dans un contexte où le pays pourrait perdre les derniers pans de sa souveraineté face aux États-Unis, ou décider de reprendre sa route en s’éloignant d’un allié envahissant et pressant.

Une Norvège faible, qui a misé depuis la Guerre Froide sur le protecteur US. Dans l’opinion publique, la Norvège devait rester dans le giron occidental, notamment pour sa propre protection, ce qui motiva le fait qu’elle fut l’un des pays fondateurs de l’OTAN. Aujourd’hui, une partie des Norvégiens s’inquiète du soutien massif à l’Ukraine, et voudrait un soutien plus mesuré, alors que les finances norvégiennes sont impactées et l’argent des contribuables dépensé dans le tonneau des Danaïdes en Ukraine. Dernièrement, le gouvernement au pouvoir avait annoncé vouloir fournir non pas 6 F-16, mais le double à l’Ukraine, avec des doutes sur cette capacité. L’état des avions en question est inconnu, non plus que les capacités de maintenance et de pièces de rechange, cependant la Norvège s’est engagée à fournir les avions de chasse avant la fin de l’année 2025. Dans le même temps, le pays avait annoncé vouloir fournir 20 véhicules blindés à l’Ukraine (de fabrication allemande), et 2 chars norvégiens conçus sur la base du Leopard 1 allemand. L’armée norvégienne semble dans une mauvaise passe, avec un effectif de 70 000 hommes, un état des lieux indiquait que l’armée ne possédait que 40 000 gilet pare-balles, suite aux « dons » généreux à l’Ukraine. Comme dans d’autres pays, le gouvernement a aussi annoncé une augmentation des dépenses militaires, avec l’ambition jusqu’en 2036, de recruter 4 600 militaires supplémentaires, 13 700 réservistes, et « une préparation des forces norvégiennes à d’éventuelles hostilités »… Dans ces conditions, les thématiques électorales seront selon les experts locaux, la militarisation et les dépenses pour la Défense, le conflit en Ukraine et également, celui de Palestine qui a beaucoup troublé l’opinion publique en Norvège.

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

Latest from Analyses

Don't Miss