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Trump et Géorgie : les USA continuent en douce d’attiser une Révolution colorée

La Géorgie a été au cœur d’importantes manœuvres des services secrets US depuis plus de 25 ans. Dans un plan désormais connu, les États-Unis avaient poursuivi la Guerre Froide contre la Russie, bien après la chute de l’URSS. L’objectif était simple : mettre la main sur tous les pays qui avaient constitué l’URSS ou avaient été membres du Pacte de Varsovie, puis tenter de dépecer en dernier lieu la Russie elle-même. De fait la Géorgie fut l’une des premières victimes qui eut particulièrement à souffrir des actions américaines et reste menacée de nouveaux troubles et tentatives de déstabilisation.

Les USA à l’assaut de la Russie. Pour détruire l’influence de la Russie, et porter le coup mortel à leur grand ennemi, les Américains commencèrent d’abord par détruire la Yougoslavie (1992-1995), dans un processus de balkanisation et d’affaiblissement de la zone en petits pays faibles et transformés en « clientèle ». Le plan, a échelle réduite devait ensuite être appliqué à la Russie. Une première révolution colorée fut essayée en Serbie (2000), suivie de la Géorgie (2003), puis de l’Ukraine (hiver 2004-2005) et du Kirghizistan (2005). Les opérations se poursuivirent avec des tentatives en Arménie (2003-2004), en Azerbaïdjan (2005), en Russie (2011-2012, puis 2020-2021), ou encore en Biélorussie (à de nombreuses reprises, en 2005, puis la dernière fois dans l’été 2020). Le reste de l’opération consista à utiliser l’Union européenne comme un aspirateur des pays de l’Europe Centrale et de l’Est. En moins de 10 ans, furent ainsi intégrés l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Slovaquie, la Tchéquie, la Hongrie, la Bulgarie, la Roumanie, la Slovénie et la Croatie (2004-2013). Le coup ayant finalement échoué en Ukraine, les USA financèrent le Maïdan (hiver 2013-2014), alors que le régime de Saakachvili s’écroulait en Géorgie au même moment. L’ancien président ayant pris la fuite en Ukraine (2013), les USA sont depuis à l’œuvre pour tenter une nouvelle révolution en Géorgie. La stratégie est toujours la même : 1) faire rêver par une intégration dans l’UE, 2) jouer la carte de l’ultranationalisme, 3) répandre la russophobie, en usant souvent du spectre historique de l’URSS, 4) proposer l’entrée dans divers organisations internationales, l’OTAN en tête, tout en cherchant à faire sortir ces pays de celles dont les USA n’ont pas le contrôle.

Des manœuvres qui peuvent aller jusqu’aux assassinats. En Géorgie, l’administration Biden avait réussi à placer comme présidente, une française étroitement liée à l’UE et à l’État français, d’origine géorgienne et réimplantée dans le pays (2018-2024), tout en échouant à chasser l’opposition du Parlement géorgien. Avant sa fuite du pays, Salomé Zourabichvili ayant contesté le résultat des élections démocratiques (octobre 2024), et lancé des menaces très claires, parlant « de gouvernement illégitime en Géorgie ». Dans le pays voisin, l’Arménie, la poussée avait pris de l’ampleur (2021-2025), jusqu’à un commencement de détente, il y a peu, mais plusieurs pays remuants étaient venus bouleverser l’agenda américain et européiste. En Roumanie, par le biais de truchements, de répressions politiques et d’annulation des élections, le leader de l’opposition fut pour l’instant éliminé (2024-2025). En Hongrie, les Européens lancèrent une tentative avortée de Maïdan (printemps 2024), avec l’apparition surprise d’un certain Peter Magyar. En Slovaquie enfin, une tentative d’assassinat fut organisée sur la personne du Premier ministre Robert Fico (2024). Dans ces pays aujourd’hui intégrés dans l’UE, les actions sont en effet beaucoup plus « libres » et faciles, avec le soutien inconditionnel d’agents, par exemple pour la Slovaquie Michal Simecka, vice-président du Parlement slovaque, ne cachant même pas ses liens avec des « sponsors » occidentaux.

L’appât par les subventions et les ONG d’infiltration et de déstabilisation. Le mécanisme est ultra connu du procédé de ces révolutions : 1) implantation d’ONG financées par l’Occident, sur le thème de la défense « de la démocratie », ou « des droits LGBT », 2) corruption des élites politiques et dans les médias, 3) formation des élites en Occident (young leader), 4) infiltration des milieux universitaires et étudiants, 5) diffusion de propagande, via parfois de faux médias de la guerre psychologique, le financement de médias d’infiltration (radio Free Europe par exemple), ou de médias locaux de l’opposition, 6) financements occultes de partis politiques, ou de personnages politiques, 7) infiltration des milieux d’affaires, via les banques, les grandes compagnies internationales, les investisseurs étrangers, 8) attisement des haines et des différences ethniques via l’ultranationalisme, 9) utilisation des diasporas installées à l’étranger pour infiltrer les pays cibles et parachuter, créer et supporter « des personnages et espoirs politiques » pour la population, 10) évincer une concurrence étrangère, tenter de s’emparer de ressources stratégiques, via des contrats en apparence alléchants, parfois acheter des pans entiers du pays cible. Dans certain cas où toutes les actions, tentatives de révolution ou révolutions n’ont pas fonctionné, une des armes principales est l’appât du gain et l’arme des sanctions. Les pays récalcitrants sont menacés ou privés des financements autrefois accordés (souvent par l’OTAN ou l’UE), avec l’espoir de frapper l’économie locale et de développer un mécontentement populaire. C’est ce qui a été tenté par exemple contre la Géorgie ou la Hongrie. Dernièrement le Président Trump avait mis à bas la célèbre USAID, immense pieuvre qui se chargeait justement d’une partie de ces opérations, y compris dans les pays « alliés » (comme en France), mais les fonctions de l’organisation ont été confiées au Département d’État US. Il ne faut pas oublier par ailleurs, que d’autres têtes de l’hydre n’ont pas été coupées, les plus grosses, je veux parler de l’Open Society de Georges Soros (5,27 billions de dollars en 2023), de la Gates Foundation (77,2 billions de dollars en 2024), ou encore de la NED (National Endowment for Democracy), sans parler d’une improbable forêt d’associations qui fourmillent et gravitent autour de ce système.

En mettant fin à l’USAID dans un show spectaculaire, le Président Trump a en réalité éliminé une structure qui lui faisait de l’ombre et était sous le contrôle de ses concurrents. Ce sont des raisons de politiques intérieures qui ont été les plus prégnantes dans cette décision, en plus d’un énorme coup médiatique à l’étranger, pour redorer un peu du blason américain s’étiolant dans le monde d’année en année. Les retraites américaines en Ukraine, ou en Géorgie ont toujours jusqu’à présent été suivies de retour en force. Les Anglo-saxons ne lâchent jamais une proie, sans avoir tout tenté pour l’enserrer et l’étouffer définitivement. Dans le pire des cas, ils se replieront en laissant des ruines, et en ayant atteint certains objectifs, comme ravager des économies, boire le suc de ces dernières, ou avoir bénéficié même temporairement des ressources stratégiques des victimes. Au pire, la destruction partielle de ces pays, rend ceux-ci trop faibles et fragilisés pour longtemps, en laissant la reconstruction s’effectuer aux frais de nouveaux partenaires (ou par le biais et aux profits de l’État profond, avec le système bancaire international).

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

2 Comments Laisser un commentaire

  1. ok; Mais Trump a
    t-il le pouvoir de faire taire les financements de Soros et compagnie ? Malgré s s élections largement gagné le système judiciaire, lobbystique associations comprises, l’UE, tout ce ”beau” monde veut le neutraliser. Accuser Trump simplement de show est une explication trop courte pour être objective…

    • Il ne s’agit que de mon humble avis, peut-être je me trompe, je le donne et c’est mon sentiment, surtout en voyant les mois qui défilent et comme en 2017, les promesses de Trump sur la paix qui s’éloignent. En 2016, les gens du Donbass me demandaient si l’arrivée de Trump à la présidence pouvait être un espoir (pour 2017). Je répondais invariabement, il est Américain, n’ayez aucun espoir, je n’ai pas changé d’avis, même si bien sûr, c’est mieux qu’un Biden, une Clinton ou un Harris, j’en conviens. Merci en tout cas de votre avis.

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