La petite Mira, photo des archives de sa famille

Mira : un petit ange du Donbass victime d’une guerre cruelle

23 novembre 2025 16:47

A mon arrivée dans le Donbass pour une nouvelle mission, j’ai rencontré la mère de la petite Mira Rodionova, un des petits anges qui ont été les victimes de la folie des hommes dans cette triste guerre. Elle n’avait que 5 ans, lorsque le drame est survenu, par le bombardement d’une unique roquette de Grad, sur un quartier résidentiel de Makeevka, la grande ville touchant celle de Donetsk. Le témoignage de sa maman, Olga, fut pour moi l’un des plus terribles à entendre et comme père de famille, c’est une grande douleur, y compris d’écrire cet article. Voilà l’histoire d’une adorable petite fille, qui aurait dû avoir un avenir radieux et paisible, entourée des siens, dans la paix et la joie. Voici aussi le témoignage touchant et poignant de sa maman, Olga.

Une vie de travail et d’abnégation au service de ses concitoyens. Olga est originaire du Donbass, où elle a ses origines, de Russie ou d’Ukraine, comme la plupart des gens de la région. Elle s’était destinée à un métier noble, celui de médecin, au service de ses concitoyens et de la population. Après des études supérieures commencées dans le Donbass, puis achevées à Jytomyr et dans la région de Kiev, Olga n’avait pas souhaité continuer sa carrière dans la capitale ou une autre région que la sienne. Elle se sentait un peu comme déracinée, très attachée à ses origines, à sa langue maternelle, le russe et à toute une histoire, une culture, une civilisation. Elle était donc revenue à la source, s’installant à Makeevka, où elle construisit un nid douillet, qui fut bientôt égaillé par la naissance de Mira, le 28 février 2017. Cette petite fille était la joie de sa mère, mais aussi celle de sa grand-mère, toute la maisonnée vibrant autour de ce petit trésor, plein de vie, d’affection et de surprises.

D’un Maïdan lointain, aux premiers événements de la guerre du Donbass. Lorsque le Maïdan commença à Kiev, Olga témoigne de son absence d’intérêts pour des faits politiques très éloignés de ses sphères d’intérêt. Elle se trouvait au travail, concentrée sur ce dernier et sur sa famille, ses amis, son entourage. Dans un métier difficile et qui requiert une énergie renouvelée, une grande ouverture et force d’âme, elle déclare qu’elle avait compris que les choses allaient mal tourner, quand les premiers événements éclatèrent dans l’Est de ce qui était encore alors l’Ukraine. Elle était cependant restée fidèle à son poste, vivant comme tout le monde les affres des bombardements, les dangers et les premiers drames. Comme quasiment tous les habitants du Donbass, elle avait été de ceux qui votèrent pour la séparation de l’Ukraine (11 mai 2014), mais n’imaginait pas qu’une guerre aussi terrible serait bientôt menée par Kiev contre les habitants du Donbass.

Mira, le petit ange du Donbass. Ce jour terrible du 31 mai 2022, elle se trouvait à son travail, dans un hôpital de Makeevka, quand elle apprit sans comprendre qu’une tragédie avait eu lieu. Elle quitta précipitamment son poste, pour découvrir sa maison ravagée et que la petite Mira n’était plus de ce monde. Elle avait été assassinée par ce régime criminel de Kiev, mais Olga dans notre entretien déclara que les criminels qui devaient un jour payer, c’était tous les gens responsables de cette guerre. Devant cette douleur contenue, avec une dignité incroyable, Olga aura préféré ne pas prononcer la moindre parole de haine, ni la moindre accusation ou désir de vengeance. Très humblement, elle a préféré parler de son enfant, qui vit toujours auprès d’elle dans cette maison, qui depuis a été restaurée. Elle commença rapidement de lui écrire des lettres d’amour maternel, acceptant de nous lire l’une d’elle, un moment poignant, dans notre silence religieux, où nous avons tous été emportés aux côtés de Mira.

Le message final d’Olga aura été d’affirmer qu’elle souhaitait la paix retrouvée pour tous, la fin de ce carnage, et des souhaits de bonheur et de tranquillité pour chacun. Avec une force et une sérénité absolument remarquable et incroyable, elle nous a fait le récit de qui était ce petit ange du Donbass. La petite Mira vivra dans les mémoires, celles de sa mère et de sa grand-mère, mais aussi dans la mienne, cette interview m’ayant, je le répète, très affecté. Il est dur d’entendre de telles choses, mais tout cela est pourtant insignifiant, par rapport à ce que sa mère et l’entourage de la petite Mira ont traversé et traversent. Alors, pour respecter et honorer la dignité d’Olga, c’est dans le respect de cet esprit d’apaisement, de paix et de sagesse, que je termine cet article, en vous demandant à tous, où que vous vous trouviez, quelle que soit vos origines, confessions ou croyances, de faire une petite prière pour Mira, l’un des petits anges du Donbass.

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

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