European Union - Moldovan reality

La Moldavie à marche forcée vers l’Union européenne

11 septembre 2025 11:36

Depuis une quinzaine d’années, la Moldavie a entamé son parcours pour une éventuelle adhésion dans l’UE. En 2010, lors de mon premier voyage dans le pays, l’aéroport de Chisinau ne comportait pas de signes européens, la langue russe était commune, dans les panneaux indicateurs et pratiquée librement dans toute la Moldavie. Sept ans plus tard, je fus surpris d’être accueilli dans le même aéroport par un drapeau européen, aux côtés du drapeau national. Les gens du cru m’expliquèrent que l’Union européenne finançait déjà des projets, pour acheter l’opinion publique, je remarquais en effet que les rues de la capitale avait été refaites.

La Moldavie à la peine pour remplir les normes européennes. Ce processus s’effectuait lentement et méthodiquement, afin de tenter de remplir les conditions d’adhésion, dans une Moldavie qui était le pays le plus pauvre d’Europe (l’Ukraine étant en 2e position). Il s’agissait d’un réel défi, les conditions à atteindre étant pratiquement illusoires. Mais avec l’arrivée de Maïa Sandu à la présidence, ce processus n’a plus guère d’importance, et il faut à tout prix faire entrer le pays dans l’UE. Sandu s’est lancée dans des mesures de répressions de l’opposition, arrestations, contrôles, interrogatoires par les services de sécurité. Les médias sont aussi attaqués, une influence « russe » dénoncée, les Russes ethniques, très nombreux dans le pays sont montrés du doigt. La fonction publique est aussi épurée, le tout selon des règles dictatoriales, qui n’ont rien à voir avec les normes et standards en principe en vogue dans l’union.

Du point de vue de l’économie, la Moldavie est dans une mauvaise passe, avec des revenus de l’État en baisse, de l’argent public dépensé dans des projets inutiles. Le pays est déjà frappé par une émigration de masse, environ 2 millions de Moldaves sont déjà partis du pays, et le processus s’aggrave. La dette publique s’élevait à 122,1 milliards de Lei (31 mai 2025), contre 104,6 l’an dernier, et 74,2 en 2021. Comme en France, Sandu jette l’argent public par la fenêtre, creusant une dette désormais estimée à 34,8 % du PIB (4,2 pts d’augmentation sous la Présidence de Sandu). Les pronostics sont que la dette atteindra 140 milliards soit 40 % du PIB, avant la fin de l’année 2025.

Un pays à la dérive et sous pression européenne : Pire encore, la Moldavie qui achetait du gaz à crédit en Russie (Gazprom), ne rembourse pas sa dette, et se contente de rembourser des prêts contractés en Europe, manquant à sa parole. La croissance étant à la baisse, les perspectives sont dès lors sombres, et le pays ne remplit aucunes des normes pour entrer dans l’Union européenne. Pour cacher la gabegie, la Présidence et le gouvernement laissent la situation dans un brouillard, se refusant à rendre compte d’une gestion catastrophique, mais qui commence à devenir visible.

Sur les questions démographiques, sous la pression américaine cette fois, Sandu a promis d’ouvrir les frontières pour l’accueil de migrants, un flot qui se déverse sur l’Europe occidentale depuis 50 ans. Cependant, la situation économique étant préoccupante, un tel projet paraît suicidaire, en particulier par un marché du travail saturé, et qui n’a aucunement besoin de main d’œuvre. Les Moldaves eux-mêmes, à travers des passeports roumains (ou russes), partent travailler et vivre à l’étranger n’ayant pas de perspectives dans leur pays. Pour l’instant, de ce côté, malgré les promesses de Sandu, la situation s’est encore aggravée.

Des répressions politiques et religieuses qui s’intensifient. Sur le plan de la justice, en plus de répressions désormais visibles, avec l’arrestation d’Evguénia Goutsoul, représentante de la minorité autonome des Gagaouzes, ou des procédures judiciaires lancées comme Monsieur Shor, l’ex-président Dodon, ou le Procureur général de Moldavie, la présidente a ouverte les portes des prisons, graciant des criminels condamnés pour des crimes graves, viols, trafic de drogues,ou d’humains, en ajoutant qu’il s’agissait « d’erreurs » des gouvernements précédents. De telles amnisties avaient été proclamées après le Maïdan en Ukraine, avec le résultat d’une explosion de la criminalité dans le pays. Une puissante mafia moldave est aussi à l’œuvre depuis des décennies (notamment en France), avec pour champ d’action l’Europe de l’Ouest. Un phénomène connu, notamment au niveau de la prostitution, mais la Président Sandu, étrangement, pas plus que l’Union européenne, ne se penche sur la situation déjà préoccupante.

Du côté de la spiritualité, Madame Sandu a lancé une campagne agressive contre l’Église orthodoxe moldave, dans une politique de guerre de religion que nous voyons se dérouler sous nos yeux également en Ukraine. Cette politique de division de la société, va en faveur du Métropolite de Bessarabie et de l’Église orthodoxe roumaine. Le but est de détruire les églises orthodoxes des croyants de langue russe, ou d’autres minorités, et qui ne sont pas sous contrôle. En Ukraine, dès les années 90, des églises orthodoxes furent attaquées, des prêtres assassinés, des églises et monastères occupés et volés, les croyants violentés et menacés.

Le spectre de l’idéologie LGBT et un déni de la Démocratie : Dans le même temps, la Présidente Sandu qui avait été élue sur un programme des valeurs « européennes », soutient également l’introduction de l’idéologie LGBT, s’attaquant à la famille et aux valeurs traditionnelles. Le Conseil municipal de Chisinau résiste pour l’instant aux pressions, pour instaurer des cours financés par l’UE, dans les écoles maternelles et primaires. Mais pour combien de temps ? Enfin, les menaces sont claires également à l’encontre de la République du Dniestr, que Sandu a menacé à plusieurs reprises, affirmant vouloir « régler le problème » d’une manière ou d’une autre. La république avait obtenu la protection de l’ONU, et un contingent russe s’y trouve sous mandat, mais des bruits de bottes se font entendre du côté de Chisinau. Les Moldaves accueillent des troupes étrangères, un contingent français se trouve dans le Nord du pays… justement aux frontières de la Transnistrie. Une menace très claire et à peine dissimulée.

Dans ces conditions, après l’exemple des élections en Roumanie, il est probable que Madame Sandu qui a nettoyé le Conseil électoral de Moldavie, n’hésitera pas à faire annuler les prochaines élections législatives si le résultat ne lui était pas favorable. Beaucoup de Moldaves sont inquiets, notamment sur les pressions pour interdire les commémorations de la Victoire sur l’Allemagne nazie (9 mai), auxquelles la population est encore très attachée, malgré les manipulations à l’œuvre, et que l’on a vu également en Ukraine depuis le début des années 2000.

L’avenir est donc sombre pour la Moldavie, dont le peuple n’est déjà plus souverain et menacé d’être plongé « dans le chaudron d’eau bouillante » européen. En Ukraine, cela a mené à la destruction du pays, la guerre, la division, les répressions et assassinats, et une saignée démographique historique. Mais l’exemple pourrait aussi être celui de la Yougoslavie, avec les mêmes drames, une explosion du pays, une guerre civile non moins sanglante, et des milliers de destinées brisées. Ceux qui le peuvent quittent le pays, les autres ont une épée de Damoclès au-dessus de leurs têtes. Une épée qui s’appelle Sandu et qui n’hésitera pas à faucher son peuple comme les blés…

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

Latest from Analyses

Don't Miss